JOURNAL DES ARTS (L n°464 - Page 1 - |Adumüé Décès Gérard Rondeau, poète visuel Le photographe ami des artistes, des écrivains et des intellectuels s'est éteint Gérard Rondea , . . Autoportrait. «o Gérard Rondeau. CRÉTEI L I]’a1/ais pose’ le monde sur la table, paru en novembre 2015, est le dernier ouvrage de Gérard Rondeau publié de son vivant par les Éditions des Équateurs. Sa disparition brutale, à 63 ans, le 13 septembre 2016, ramène vers ce livre, cartographie poétique d’une œuvre, d’une vision, d’une vie revisitée à l’aulne d’une sélection de photographies noir et blanc. Né à Châlon-sur-Marne (Marne), Gérard Rondeau a vécu plusieurs années à Reims (Marne). Le photographe est surtout célèbre pour ses portraits d’écrivains, d’intellectuels et de peintres, en particulier de ses amis Paul Rebeyrolle et Yves Gibeau, objets chacun d’un livre : Rebeyrolle au le journal d’un peintre (Ides et Calendes, 2000, réédité chez Équateurs en 2013) et Les Fantômes du Chemin des Dames (Le Seuil, 2003). Ce dernier ouvrage a été réalisé quelques années après la mort de fauteur d’Allons z’enfants... auquel Gérard Rondeau a aussi consacré un film, Le Presbytère d’Yves Gibeau, portrait émouvant d’une maison d’écrivain et d’un romancier hanté par la guerre de 1914-1918. Images du siège de Sarajevo Le travail de Gérard Rondeau {apparente à la formulation, par bribes, de poèmes visuels atemporels. Paysages de Champagne quatre-vingts ans après la Première Guerre mondiale ou images du siège de Sarajevo et des différentes missions effectuées avec l’organisation Médecins du Monde imprègnent la même approche sensible de la campagne, des êtres et du détail, tandis que ses photographies de la cathédrale de Reims et des coulisses des musées forment d’autres journaux intimes savoureux. Constituée au fil des lectures, des rencontres, des voyages et des commandes, en particulier du quotidien Le Monde ou de la Ville de Reims, l’œuvre témoigne de sa grande élégance d’esprit qui sait faire parler les pierres, évoquer la présence de Yabsence, convoquer la mémoire dormante et saisir la grâce de l’instant. Ces portraits de Cabu, Jacques Derrida, Louise Bourgeois, Susan Sontag, Roy Lichtenstein, Alain Bashung ou Paul Bowles suggèrent plus qu’ils n’affirment. Élu meilleur artiste plasticien de l’année lors de la cérémonie des Globes de Cristal 2007 et représenté par l’Agence Vu, Gérard Rondeau a été toutefois soutenu ces dernières années à Paris essentiellement par la Maison européenne de la photographie, qui a exposé en avril-juin 2015 «Au bord de Fombre », autre grand voyage effectué à rebours dans l’œuvre. Christine Caste Philharmonie Un nouveau décompte La chambre régionale des comptes estime le coût de la construction à 535 M=€ au lieu de 389 M€ PARIS I La chambre régionale des comptes (CRC) de la région Île-de-France a refait les additions. Selon la juridiction, le budget final de construction de la Philharmonie de Paris n’est pas de 389 millions d’euros, comme le futur établissement public l’avait indiqué lors de Fouverture en janvier 2015, mais de 535 millions d’euros. Pour la CRC, «par rapport à [estimation du “pre'pr0gramme” de septembre 2006, ce chiflrage marque un triplement (3,1). En le rapportant aux conditions économiques de septembre 2006 (446,90 M€), le coût est multiplie’ par 2,6». La chambre exerçant son contrôle sur les collectivités locales, c’est la Ville de Paris, mise en cause dans ce rapport, qui a répondu en contestant ces chiffres et leur mode de calcul. S’agissant du chiffre de départ, elle considère que les 173 millions d’euros du préprogrammé ne couvrent pas fintégralité du périmètre des coûts finaux et qu’il faut par ailleurs prendre en compte Yinflation. Cette réactualisafion faite, la Ville aboutit à un budget initial de 294 millions après avoir été réactualisé selon le périmètre et le coût de la vie en 2015. En revanche, elle ne dit rien du montant définitif de la chambre (535 millions), préférant La Philhäffiÿiääîfie l>a s. (E) Photo: William BeuLicurdet/Plgilharmonie de Pans. en rester au chiffrage officiel de 389 millions, ce qui lui permet de ramener faugmentation des coûts à 32 %. Un peu gênée, la Ville est cependant bien obligée d’admettre cette dérive budgétaire de près de 100 millions d’euros. Parmi les surcoûts, la chambre pointe une décision de la Ville de Paris relative au financement de la construction. Celui-ci a été principalement supporté par l’État et la Ville (et dans une moindre mesure par la Région). Mais alors que l’État a emprunté directement le montant à sa charge, la Ville de Paris a préféré laisser Yassociation de préfiguration qui portait la Philharmonie emprunter ellemême et lui rembourser le prêt sur dix ans tout en garantissant l’emprunt obligataire auprès de la banque (la Société générale). La chambre estime que, en e m p r u n t a n t directement, la Ville aurait pu économiser 20 à 2 5 m il li o n s d’euros sur les 234,5 millions que lui coûtera au total Fopération. Dans sa réponse, le secrétaire g é n é r al d e l a Ville conteste là aussi un « biais méthodologique» de la chambre et estime le surcoût à «seulement» 6,3 millions d’euros. Il ajoute que la Ville est en train de renégocier sa garantie avec la Société générale, espérant économiser 4 millions d’ici à la fin de Femprunt. Au passage, la chambre révèle que le montant des honoraires de Farchitecte jean Nouvel a augmenté de 40 %, passant de 16,3 millions à 23,17 millions d’euros, mais que la Cité de la musique-Philharmonie de Paris a retenu près de 3 millions d’euros sur sa rémunération. Alors que le succès du lieu, en termes d’aftluence dans les expositions et dans le grand auditorium, est salué par tous, les démêlés entre le maître d’œuvre et le maître d’ouvrage ne sont pas terminés. Jean-Christophe Castelain Aurelie Nemours ’Astyanox' i973 huile sur toile 50 x 50 cm combat prit leur propre vision. PRIX AUREUE NE/\/\OURS 20lô JEAN-FRANÇOIS DUBREUIL Association Nemours, l2 l Avenue d’ItaIie, 75013 Paris. Elle a ainsi souhaité voir honorés, maintenant et dans l'avenir, les artistes qui ont travai conséquente et novatrice dans le domaine de la pensée en affirmant C'est en 2000 qu'Aurelie Nemours a décidé de créer un prix annuel décerné a un créateur dont l'oeuvre traduit l'exigence de rigueur et le our les valeurs de l'esuele que soit sa discipline et la orme de son expression. é de façon LE JOURNAL DES ARTS N‘-’464/ Du 30 septembre uu 13 octobre 2016 4 Actualité Diplomate de carrière, Bénédicte de Montlaur dirige depuis avril 2015 les services culturels de Fambassade de France aux États-Unis. Spécialiste du monde arabe, elle a été responsable de la sous—direction d’Afrique du Nord au ministère des Affaires étrangères. Elle a enseigné la diplomatie et les questions internationales à l’École normale supérieure dont elle est par ailleurs diplômée. Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères, a dit à plusieurs reprises que la « diplomatie culturelle >> était << au cœur de son action >>. En quoi cela consiste-t-il aujourd'hui Z Il s’agit de promouvoir le meilleur de la créativité française à l’étranger. Notre action aux États-Unis est particulière, car le pays est prescripteur dans de nombreux domaines : l’art contemporain et le cinéma, bien évidemment, mais aussi l’édition et toutes les industries culturelles et créatives. Il faut faire connaître les talents français ici et les aider à exposer, jouer, produire, publier... Nous connaissons le réseau culturel local et sommes là pour faciliter le succès des artistes et intellectuels français aux États-Unis. Nous soutenons financièrement beaucoup de projets, mais notre cœur de métier reste la diplomatie : lobbying, mise en relation, facilitation. Dans le domaine éducatif, nous faisons la promotion de la langue française, afin qu’elle soit parlée et apprise sur tout le territoire. C’est une logique d’intluence. Enfin, il y a le pan universitaire de notre action. Nous assurons la présence et Finfluence de la France sur les campus américains. Cela passe notamment par la participation aux débats pour lesquels nous invitons des grandes voix françaises. Il s’agit autant de relayer les idées que de valoriser les intellectuels français. À long terme, c’est ainsi que nous attirons en France de nombreux étudiants américains. Le fait que les différentes structures (alliances françaises, Institut français, centres culturels, services culturels de l'ambassade) se superposent ne nuit-il pas à la lisibilité de votre action ? Un choix politique a été fait : il s’agit de diplomatie culturelle, donc c’est le ministère des Affaires étrangères qui a l’autorité et coordonne les actions. Nous travaillons étroitement avec l’lnstitut français, et, au cas par cas, avec le ministère de la Culture et d’autres entités qui nous apportent leur expertise. Dans notre cas, nous œuvrons aussi avec les cent dix alliances françaises des États-Unis. Dans le contexte des attentats, Faction des services culturels delïnnbassade consiste à corriger l’image véhiculée par les médias dominants Comment sont organisés les services aux États-Unis ? Uimportance de New York crée une exception : les services de coopération et d’action culturelle (SCAC) de fambassade sont basés ici et non à Washington DC. je suis conseillère culturelle à New York mais je coordonne une dizaine d’attachés culturels répartis dans les grandes villes du pays. Notre stratégie est liée à Fimportance des réseaux culturels locaux : à Los Angeles, l’attaché est spécialisé en cinéma et en industries créatives ; à New York, Chicago ou Houston, nos attachés sont spécialisés en arts vivants et arts visuels. À Boston, c’est un pôle universitaire ; en Géorgie et en Louisiane, un pôle éducatif. Chaque antenne fonctionne par priorité. Quels sont les projets emblématiques de votre action récente? Il y a deux domaines complémentaires : le travail de fond et les mécanismes de soutien. Le travail de fond, qui a pris une tournure particulière avec le contexte des attentats, consiste à corriger l’image véhiculée par les médias dominants. Le prisme médiatique réduit la vie politique et intellectuelle en France à des considérations sécuritaires. Il est primordial, dans une logique d’attractivité, de lutter contre ce phénomène et de montrer les grands débats, la création, la richesse de la société. Il y a des projets merveilleux comme celui de [la transplantion, sous la forme d’une résidence d’étudiants, NDLR] de l’École supérieure des beaux-arts de Nantes au Texas, une scène culturelle dynamique Bénédicte de Montlaur. u‘ Photo : l(\‘ill1Y(’I1InII. qui reflète bien plus la réalité de notre pays et dont nous facilitons quotidiennement la diffusion ici. Ensuite, il existe des mécanismes de soutien dans tous les domaines. Côté universitaire, nous avons lancé une plateforme d’anciens élèves américains en France (« Alumni »), pour consolider les liens existants. Nous devons aussi stabiliser la venue d’étudiants américains en France, qui a baissé de 10 % avec les attentats. . RAVURE > j ARCHITECTURE ART ENVIRONNEMENTAL ' LIVRE D'ARTISTE , . Wwt-"flttä “m; 523mm PEINTU SCULPTURE PHOTOGRAPH ART DIGITA VIDÉO, CHAMPS-ELYSÊES L3-ll: Oct EEEEEE n-uuoan-an LA |(UNSTHALLE l [ENTRE D'ART CONTEMPORAIN \ MULHOUSE La baisse est moins prononcée que celle du tourisme, mais il nous faut la contrer rapidement. Et que faites-vous pour les arts visuels, qui constituent un enjeu important à New York ? Nous relançons << Étant donnés», un fonds créé en 1994 destiné à développer aux États-Unis les carrières des artistes français émergents. Il y a vingt ans, Pierre Huyghe avait bénéficié de ce fonds, par exemple. En 2015, les présences de Philippe Parreno à la foire Armory Show et de Kader Attia au Guggenheim Museum ont été facilitées par notre action. « Étant donnés » utilise trois leviers. Nous envoyons des commissaires américains en France, afin d’enrichir leur vision de la scène française. En 2015, deux jeunes curateurs issus du SFMoMA [San Francisco Museum of Modem Art] sont venus. L’année précédente, c’était Jarrett Gregory, commissaire recrutée depuis par le Lacma à Los Angeles. A court et à long terme, ce type d’action entraîne plus d’invitations pour les artistes français, et parfois directement des acquisitions par des institutions américaines, comme récemment pour deux vidéos de Cyprien Gaillard [Desniansky Raion (2007), et Artefacts (2011), acquises par le MoMA de New York en 2015, NDLR]. Deuxième axe : nous soutenons des résidences d’artistes français aux États-Unis, en veillant à ce qu’ils créent des liens durables avec les institutions américaines. Enfin, nous encourageons les lieux américains à intégrer des artistes français dans leur programmation. Au total, nous affectons environ 150 000 dollars (134 000 euros) à ce programme chaque année. L'ACTUALITÉ VUE PAR BÉNÉDICTE DE MONTLAUR, conseillère culturelle, ambassade de France aux États-Unis « Promouvoir le meilleur de la créativité française» Quand Emmanuel Perrotin ouvre une nouvelle galerie à New York, quel est votre rôle? Un galeriste de cette taille a déjà son réseau new-yorkais. Nous aidons ceux qui en ont besoin et nous le demandent. Nous sommes plus légitimes pour accompagner le projet de galerie temporaire de Frank Elbaz à Dallas, par exemple, ou pour faciliter la mise en place du partenariat entre le Palais de Tokyo (Paris) et la Biennale d’architecture de Chicago. Le cas de l’École des beaux-arts de Nantes qui s’installe à Marfa, au Texas, est parlant : vu Féloignement du lieu, les équipes nantaises ne sont que rarement présentes. Notre attachée culturelle à Houston, Sylvie Christophe, assure un lien plus régulier avec les institutions texanes partenaires. Avec quels moyens travaillez-vous ? Une majorité de projets sont financés par Fintermédiaire du Fonds franco-américain pour les échanges culturels (Face), que nous avons créé. C’est une fondation de droit américain, véhicule juridique le plus pratique pour attirer des mécènes. Les fonds publics (2,7 millions d’euros) issus du ministère des Affaires étrangères représentent la moitié de notre budget et couvrent nos coûts fixes sur tout le territoire. Tous nos investissements et mécanismes de soutien, soit l’autre moitié de notre budget, sont en revanche le fruit des partenaires que nous parvenons à fidéliser. Chaque projet pérennisé doit, a terme, s’autofinancer. Sur quels critères évaluez-vous votre action ? Ils sont rares, reconnaissons-le, car visibles uniquement sur le long terme, comme tout travail d’influence diplomatique. Quelques exemples néanmoins : en dix ans, le nombre d’élèves inscrits dans des filières bilingues français anglais est passé de 24 à 1 400 dans le pays, répartis dans 134 filières, au travers de notre fonds de soutien aux écoles publiques américaines. Autre exemple : aux États-Unis, on lit peu de traductions. 95 % des livres lus sont d’abord écrits en anglais. Mais parmi les 5 % de livres traduits, la moitié sont traduits depuis le français. Nous pensons que ce chiffre est dû à notre travail de fond. Quel est votre principal objectif pour l'année qui vient? Augmenter les moyens de Face pour agrandir son rayon d’action l Propos recueillis par David Robert -) Retrouvez la fiche biographique développée de Bénédicte de Montlaur sur: www.leJourna|desArts.fr LE JOURNAL DES ARTS M9464 / Du 30 septembre au 13 octobre 2016 -|Aaumné Trafic d'art Un bras armé au service de la culture Le Comando Carabinieri, créé en 1969, intervient de manière exemplaire dans la lutte contre le trafic international d'œuvres d'art. Une exposition au Palais Barberini à Rome présente ses activités ROME I Le Palais Barberini, Musée national d’art ancien de Rome, accueille, jusqu’au 30 octobre, une exposition intitulée << L’Arrnée pour l’art et la légalité >>. Derrière la tonalité martiale du titre se cache la volonté d’évoquer Fimportance du rôle joué par la section des carabiniers affectée à la défense du patrimoine culturel : le « Comando Carabinieri perla Tutela del Patrimonio Artistico ». Modèle unique par son fonctionnement, cette force policière à caractère militaire s’est révélée pionnière dans le démantèlement du trafic de biens culturels. Une histoire singulière Les officiers, sous-officiers et policiers qui composent le Comando TPC, créé en 1969, dépendent à la fois du ministère italien de la Défense et de celui des Biens et Activités culturels. Le succès de ses missions est pour une bonne part dû à la création, en 1980, d’une base de données. Baptisée << Leonardo >>, elle est constituée de 170 O00 fiches et de 6 millions de documents relatifs à des œuvres ‘ volées. En lien avec lnterpol, l’lcom (Conseil international des musées) ou l’Unidroit (Institut international pour Funification du droit privé), le Comando est intervenu sur des zones d’opérations militaires (au Kosovo, en Irak). Pilier de la force armée dïntervention pour la préservation du patrimoine culturel mise en place par l’0NU, il revendique pleinement son rôle de modèle et de précurseur. En prenant pour point de départ les différentes opérations ayant abouti à la restitution d’œuvres, Yexposition romaine impressionne par la richesse des pièces présentées : vases étrusques, fresques du site de Pompéi, tableaux de maîtres, reliquaires. En dehors des enjeux esthétiques, l'objectif reste de sensibiliser sur les pratiques crapuleuses d’un marché de l’art parallèle qui s’appuie largement sur des intermédiaires locaux. La Suisse, la Russie et les États-Unis — malgré la collaboration de certaines institutions américaines — sont les pays le plus souvent impliqués dans le trafic d’art. Un exemple éloquent : en 1981, un sarcophage présentant une Ariane endormie, provenant de fouilles illégales pratiquées dans les années 1930, s’est retrouvé dans une 2016 Demandez la carte l Un pass culture d'une valeur de 500 euros pour lesjeunes Italiens ROME I À partir de ce mois d’octobre, en ltalie, les jeunes qui deviennent majeurs cette année bénéficieront d’une << carte culture >> d’une valeur de 500 euros à utiliser dans le domaine culturel. Cette initiative du gouvemement s’inscrit dans le cadre de Fengagement « 1 euro pour la sécurité -1 euro pour la culture », dont le président du Conseil, Matteo Renzi, a tracé les contours lors du congrès << Italie-Europe : une réponse à la terreur», après les attaques terroristes qui ont frappé Paris. Le financement du pass culture a été intégré au budget « sécurité et culture » de la loi de finances pour 2016. Les jeunes concernés seraient plus de 574 000 et le budget prévu est de 290 millions d’euros. Si la loi de finances avait destiné cette mesure aux citoyens italiens et communautaires résidents en Italie, un récent décret-loi a étendu aux citoyens extracommunautaires en possession d’un permis de séjour le droit à la carte culture. Le gouvernement a aussi fintention de réitérer Finitiative l’année prochaine. Films, concerts, musées... Les jeunes majeurs pourront utiliser leurs 500 euros pour acheter des livres ou des billets d’entrée à des films, concerts, spectacles de théâtre, de danse, et pour visiter les musées, monuments, parcs archéologiques et réserves naturelles. Depuis le 15 septembre, les bénéficiaires doivent s’enregistrer sur un site pour bénéficier de leur crédit virtuel. Parallèlement, les organismes culturels, publics et privés, mais aussi les entreprises commerciales (par exemple les librairies) adhérant à l'initiative peuvent s’enregistrer. Les jeunes pourront ainsi générer — à travers Fapplication — leurs bons d’achat pour les livres et tickets. Le sous-secrétaire de la présidence du Conseil, Tommaso Nannicini, et le président de l'association des communes italiennes, Piero Fassino, ont adressé conjointement une lettre aux maires pour les inviter à diffuser les informations nécessaires aux bénéficiaires et aux responsables des musées et théâtres de leur ville. Le pass culture fait partie d’un ensemble de mesures pour la culture. Dans le programme du gouvemement, plus de 54 millions d’euros sont destinés aux bourses pour les étudiants méritants ; 15 millions au «bonus Stradivari », afin que les élèves des conservatoires puissent acheter un instrument de musique ; 100 millions aux associations culturelles ; 500 millions à la requalification des zones périphériques. À ce budget il faut ajouter le plan d’un milliard pour la sauvegarde du patrimoine (lire le jdA n” 457, 13 mai 2016). Eugenio Murrali galerie américaine et a été vendu à un collectionneur japonais. La diffusion par l’Usice, le service américain spécialisé dans l’immigration et les douanes, d’une photographie de la «belle endormie » (nom choisi pour cette mission) a permis le retour de l’œuvre sur le sol italien. Le Comando intervient également dans la lutte contre le vol d’œuvres dans les musées. La disparition, avec la complicité d’un gardien, de deux Van Gogh et d'un Cézanne à la Galerie nationale d’art moderne et contemporain de Rome ont réve1é les dysfonctionnements des systèmes de surveillance de certaines institutions italiennes. Enfin, si le Comando TPC affiche son rôle de pionnier, il envisage son destin dans le droit-fil des missions américaines (« Monuments Men») menées pendant la Seconde Guerre mondiale pour lutter contre les spoliations allemandes. En 2014, le Comando a retrouvé un panneau siennois du XIV“ siècle spolié en 1944. Preuve de l’efficacité des techniques avant—gardistes élaborées pour faciliter les recherches, son système d’étude des transactions par Internet a permis de localiser fœuvre. Dans une période où l’ltalie affiche son désir de renouveler sa politique culturelle, proposer une exposition sur un Comando gardien du patrimoine présente un intérêt indéniable. Pour le ministre des Biens culturels, Dario Franceschini, l’ltalie, après avoir été l’objet de nombreux pillages, veut devenir une référence en matière cle préservation des biens culturels. Estelle Bories Neuflize OBS est partenaire de la Ville de Paris pour l'édition 2915 de Nuit Blanche le samedi la‘ octobre. u‘U|T BLANCHE [2015] Alain Fleischer, 1E/mm/re le Vent, Nuit Blanche, 201B. Courtesy de l'artiste. der les yeux ouverts sur le monde Neuflize OBC, 350 années d'expérience pour créer de la valeur Nous avons l'expérience de l'avenir Neuflize OBC ABN AMRU mam GRAND»; DU l\/IINISTEREV DE TBWAKIORPORATE - © Dan Mountford LE JOURNAL DES ARTS N'-’464/ Du 30 septembre au 13 octobre 2016 a Actualité à Paris le 12 septembre. ©ClPAC. PARIS I « Les assises seront le temps de la politique », avait prévenu Catherine Texier. Dans un texte d’ouverture également publié en tribune dans le quotidien Libération daté du jour, la présidente de la Fédération des professionnels de l’art contemporain (Cipac) — par ailleurs codirectrice du Frac-Artothèque du Limousin — a rappelé le déficit chronique de structuration dont souffre le secteur des arts visuels : pas de Profession L’État adoube le Cipac branche professionnelle, pas de convention collective, pas de représentation apte à faire le poids et disposant des compétences pour traiter des questions qui concernent les professionnels de la production, de la diffusion et de la médiation dans l’art contemporain. Le Cipac, depuis sa création en 1997, a pour mission principale Forganisation de la filière. C’est la raison d’être de cette fédération et Fobjectif de sa présidente, renouvelée pour deux ans dans ses fonctions en juin dernier. Le Cipac s’est réuni le 12 septembre au Carré du Temple pour des assises qui devraient être annuelles. Des objectifs synthétisés par les parlementaires présents Entre Yintroduction de Catherine Texier prononcée devant les parlementaires présents (Patrick Bloche, député de Paris, président de la commission des affaires culturelles à l’Assemblée nationale ; David Assouline, sénateur de Paris, vice-président de la commission de la culture du Sénat ; et Sylvie Robert, sénatrice d’Illeet-Vilaine, secrétaire de la commission de la culture du Sénat) et Fallocution de clôture de Régine Hatchondo, directrice générale de la Création artistique (DGCA), l’unité de la profession a été le mot d’ordre. Les associations membres du Cipac se sont en effet succédé à la tribune pour dresser un état des lieux de leurs professions respectives : Christelle Kirchstetter, directrice de l’École supérieure des beaux-arts de Nîmes et représentante de l’Association nationale des écoles supérieures d’art (ANdÉA) ; Étienne Bernard, président de DCA, œuvrant pour le développement des centres d’art ; Bernard de Montferrand, président de Platform, qui regroupe les 23 Frac (Fonds régionaux d’art contemporain) ; David Cueco, venu pour la Fédération française des professionnels de la conservatien-restauration ; Éric Dupont, pour le Comité professionnel des galeries d’art ; Marianne Lanavère, directrice du Centre international d’art et du paysage de Vassivière et présidente du réseau Cinq,25... Si la litanie des interventions a pu en diluer l’impact, elles ont affiché une cohérence certaine. Bien que les intervenants n’aient pas toujours su profiter de la qualité des invités pour susciter un débat de fond, ils ont délivré un message d’unité et de mobilisation. Patrick Bloche et Sylvie Robert ont démontré leur bonne connaissance des dossiers et leur compréhension des enjeux, en élaborant une synthèse des objectifs énoncés : mieux définir les moyens de formation des élus à la politique culturelle ; faire adopter les «schémas d’on'entation pour le développement des arts visuels >> (Sodavi) ; s’inspirer des métiers d’art en proposant une lecture — entre autres — économique du secteur, qui permette définition et reconnaissance de ses métiers. Dans cette séance studieuse, on peut regretter Fabsence de quelques acteurs importants tels l’ADAGP (Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques) ou le Palais de Tokyo (centre d’art membre de DCA). Elle aurait pu attirer aussi davantage d’élus locaux, dont le rôle a été longuement commenté à l’heure d’une réforme territoriale qui bouleverse le secteur. Un futur « Conseil national des arts visuels >> Uaprès-midi, la volonté de structuration a trouvé un premier écho dans Fintervention d’Emmanuel Négrier, directeur de recherche en sciences politiques au CNRS et professeur à l’université Paul-Valéry de Montpellier. Celui-ci a posé les jalons d’une étude statistique poussée. Dans une présentation captivant un auditoire peu accoutumé à voir son activité ainsi disséquée, il a partagé ses données économiques et financières, sociales, culturelles et artistiques. En comparant les budgets et structures de financement des Frac et des centres d’art, il a construit une vision d’ensemble des rôles respectifs des différentes collectivités dans Féquilibre national de la diffusion. En scrutant leurs politiques d’acquisition, il a mis en valeur les différences de vocation entre les structures. En analysant les statuts des techniciens, des personnels administratifs et des artistes, il a posé les premiers fondements d’une branche professionnelle structurée. Régine Hatchondo a clos cette journée résolument politique par des annonces : la création d’un « Conseil national des arts visuels >> ou « Conseil national des professions >> avant la fin de Fannée. À ses côtés sur scène, Réunie pour la première fois sous la forme d'assises, cette fédération de professionnels a affiché son unité autour de la structuration du secteur. Un << Conseil national des arts visuels >> verra le jour avant la fin 2016 Catherine Texier s’est réjouie de la nouvelle tout en s’interrogeant : de quel pouvoir pourra jouir ce conseil national et quelles compétences pourra-t-il exercer, sans branche professionnelle identifiée sur laquelle s’appuyer ? Sans répondre sur la méthode, qui passera nécessairement par la concertation syndicale, Régine Hatchondo a pourtant donné des gages sur le fond, décrivant un organe doté de trois commissions : l’une vouée à l’emploi et la formation, la deuxième à la protection sociale et la dernière à la protection des droits d’auteur à l’ère de Flnternet. Perfectibles dans leur forme, les premières assises du Cipac ont néanmoins recueilli les fruits de leur stratégie politique : en choisissant ce cénacle pour annoncer la création d’un conseil national, Régine Hatchondo adoubé le Cipac. Certes, le décret attendu avant Noël devra confirmer la faisabilité et les pouvoirs réels de cet organe. Mais, in extremis avant la paralysie de 2017, les organisations professionnelles des arts visuels entrevoient enfin la possibilité de faire avancer leurs dossiers. David Robert GAlERlE l4 RUE DE SElNE www.gc1lerie—bc1.com +33(O)l432
>, présentée à la BNF «Il ne s’agissait pas de recycler des idées reçues» Après l’exposition « Richard Prince. American Prayer », présentée à la Bibliothèque nationale de France (BNF) en 2011, l’historien de l’architecture et collectionneur américain Robert Rubin, ex-président de la Centre Pompidou Foundation (20062012), revient à la BNF avec « La France d’Avedon. Vieux monde, New Look », qu’il cosigne avec Marianne Le Galliard (à voir à partir du 18 octobre). ll détaille les raisons de cette exposition en France. Pourquoi avoir proposé une exposition « Richard Avedon » à la BNF? A la suite de << Richard Prince. American Prayer », la famille de Richard Avedon m’a proposé d’écrire sur les relations entre Avedon et Allen Ginsberg. Je me suis plongé dans le projet. Je suis un ami du fils d’Avedon depuis cinquante ans, j’ai observé de loin la carrière de son père. L’idée des liens entretenus par Avedon avec la France est venue au cours de ces recherches. Des recherches qui auraient pu déboucher sur une exposition présentée d'abord aux États-Unis... Le texte qui en a résulté a été justement publié dans le catalogue d’une in. © Photo : Thonussi Kora Moving image. exposition de la Gagosian Gallery de New York sur les grands formats d’Avedon [« Richard Avedon, murals 81 portraits», 4 mai-27 juin 2012]. Monter un projet sur Avedon est un « big deal ». Avedon est très commercial, et la fondation est extrêmement sollicitée. Il ne s’agissait pas de recycler des idées reçues sur l’œuvre mais d’apporter un autre éclairage. Pour pouvoir commencer aux États-Unis, notre exposition aurait dû être plus « mainstream », comporter plus d’images phares. De la même manière, il aurait très difficile de monter «American Prayer», car dès que vous arrivez avec un projet sur Richard Prince, les institutions américaines veulent un blockbuster. Nous avons la possibilité de faire circuler «La France d’Avedon » pendant cinq ans. Aussi, au lieu d’essayer de convaincre des gens que cette exposition Va être formidable, je préfère qu’elle soit vue durant la Fiac [Foire internationale d’art contemporain] et Paris Photo. La vie m’a appris que les gens manquent souvent d’imagination. Avez-vous évoqué « La France d'Avedon » avec Quentin Bajac, qui dirige le département photo du MoMA de New York? Oui. C’est d’ailleurs lui qui m’a présenté Marianne Le Galliard qui préparait alors un doctorat sur Jacques-Henri Lartigue et Avedon. L’arrivée de Quentin Bajac au MoMA a fait le plus grand bien au département photo, un peu crispé LA FRANCE D'AVEIJ0ll, VIEUX MONDE, NEW LOOK, 18 octobre 2016-26 février 2017, BNF, site François-Mitterrand, Galerie 2, avenue de France, 75013 Paris, tlj sauf lundi, du mardi au samedi 10h-19h, dimanche 13h-19h, entrée 9 €. par l’héritage archimoderniste de Szarkowski [John Szarkowski, conservateur pour la photographie au MOMA de 1962 à 1991]. Pourquoi avoir proposé « La France d'Avedon >> à la BNF et pas à une autre institution parisienne ? Parce que la BNF est une institution pluridisciplinaire consacrée à la culture au sens large. Et, par ses collections, elle est en France le premier musée du livre et de la photographie. Avedon, qui était très focalisé sur les livres photo, aurait aimé cette idée. Ne la doit-on pas aussi à vos liens avec Bruno Racine alors président du Centre Pompidou ? Effectivement. Uexpérience de l’exposition << Richard Prince» a tellement été bien vécue des trois côtés, c’est-à-dire par l’artiste, le commissaire et l’institution, que l’on était partant pour un deuxième projet dans la ligne que Bruno Racine [président de la BNF du 2 avril 2007 au 1" avril 2016] a construite avec Richard Prince, Matthew Barney et Anselm Kiefer. Quelles sont vos relations avec les autres institutions parisiennes, en particulier le Centre Pompidou 2 Rappelons que vous avez démissionné de la présidence du Centre Pompidou Foundation en 2012 après des divergences avec Alain Seban... J’entretiens de très bonnes relations avec Fabrice Hergott [directeur du Musée d’art moderne de la Ville de Paris] et avec Bernard Blistène [directeur du Musée national d’art moderne, Mnam]. Je n’ai aucun projet avec leurs institutions mais je poursuis mes donations et mes prêts. Je suis impliqué dans « Pierre Chareau » qui ouvre début novembre à New York au Jewish Museum et dont le Mnam est le prêteur principal, et je viens de donner à la Fondation Pierre Bergé-Yves Saint-Laurent une collection d’une cinquantaine d’objets pour la maison JeanCocteau à Milly-la—Forét. Avez-vous gardé des liens avec le Centre Pompidou Foundation 2 Aucun. Je suis davantage intéressé aujourd’hui, relativement à un projet, par les relations directes avec les conservateurs et les musées que par ce qui peut me lier à une seule institution. D’une façon générale, j’en ai assez de solliciter de l’argent. Je suis trop franc pour évoluer dans ce milieu. Pour l’instant mon prochain projet concerne Calder et Yarchitecture, j’ai écrit un texte sur son studio en France dans [le numéro 1, 2015, de] Cahiers d’Art [la revue éditée par le Mnam]. Quel regard portez-vous sur l'action du nouveau président du Centre, Serge Lasvignes? Je ne l’ai pas encore rencontré. De toute façon, c’est Bernard Blistène qui compte pour moi. Les collectionneurs, qui sont des mécènes potentiels, sont plus intéressés par les professionnels du milieu de l’art qui montrent des qualités de leadership que par les fonctionnaires. Bien sûr, cela peut recouvrir les deux aspects comme pour Bruno Racine, mais ce n’est pas forcément toujours le cas. Propos recueillis par Christine Caste ‘ HART Contemporain débarque ROUEN PARC EXPO 7>9 OCTOBRE 2016 Halle de la Courrouze Musée clés beaux-arts de Rermes Frac Bretagae 40mcube Outsite Musée de la danse/ EESAB - site de Rennes Le praticable Lendroit éditions École des Beaux-arts 01.10 -11.12 2016 art-up.com La Criée centre d'art (Saint-Brieuc) à ËÛRÏGmPP-“at” Passerelle Centre d’art Gaierie Art & Essaâ contem orain (Brest) lesate|iersderennes.fr î l0 99g ç U" E‘§'é.‘€.’§t‘1§5m. :,¢:.':.::!*= BlLLETTERlE s‘ ë '1 Reioi ne —n l I" ,. 9 w A A p "““’ _3m V , ‘x #ARiu;2(oU1S¢ art-uP.com ,,,,E_x_P°.,.. 87”” n a u v d‘ ËMÊÊ î l i“ “‘ T initia ti-äïzeä “V LE JOURNAL DES ARTS N9464/ Du 30 septembre ou 13 octobre 2016 8 Actualité L'ESSENTIEL DE LA QUINZAINE Interdiction du commerce de l'ivoire, le casse-tête administratif PARIS I La mise en œuvre de l'arrêté interministériel du 16 août 2016 interdisant strictement le commerce d'objets contenant de l'ivoire d'éléphant ou de la corne de rhinocéros sur le territoire national inquiète les professionnels. Une dérogation concernant « le commerce et la restauration d'objets travaillés » datant d'avant1975 (date d'entrée en vigueur de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction dite << Cites >>) pourra être accordée, à condition d'en faire la demande expresse à la direction régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement. Les professionnels craignent que les services ministériels ne parviennent à faire face à l'afflux des demandes. Or, passé un délai de quatre mois, l'absence de réponse de la part de l'administration est considérée comme un refus. N. E. L'artiste Hassan Sharif disparaît DUBAÏI Pionnier de l'art conceptuel aux Émirats arabes unis, l'artiste Hassan Sharif est décédé le 18 septembre à l'âge de 65 ans des suites d'un cancer. Né en 1951 à Dubai‘, Hassan Sharifa commencé sa carrière dans les années 1970 en tant que caricaturiste pour le journal Akhbar Dubai avant de découvrir Marcel Duchamp et le mouvement Fluxus durant ses études au Royaume-Uni à la Byam Shaw School of Art. Représenté en France par la galerie gb agency, l'artiste a notamment bénéficié en 2011 d'une rétrospective, << Hassan Sharif Experiments & Objects, 1979-2011 >>, accompagnée d'une monographie, au Qasr aI—Hosn à Abou Dhabi. Exposé à plusieurs reprises à la Biennale internationale de Sharjah, Hassan Sharifa également fait partie dujury de la manifestation en1997, 1999 et 2003. N. E. Création d'un << fonds mondial pour la protection du patrimoine >> NEW YORK I Le président François Hollande a annoncé le 2o septembre à New York la création d'un fonds mondial privé qui «financera le sauvetage des œuvres et des monuments, assurera la restauration et la reconstruction des lieux de mémoire et formera des spécialistes, des archéologues, des conservateurs des historiens ». Ce fonds, qui « pourrait réunir jusqu'à 1oo millions de dollars », sera créé à l'occasion de la conférence internationale sur le patrimoine de l'humanité menacé que la France et les Émirats arabes unis organisent les 2 et 3 décembre prochains en marge de l'achèvement du Musée du Louvre-Abou Dhabi. N. E. Le Lait à nouveau en difficulté ALBI I À la fin de l'année 2017, le Laboratoire artistique international du Tarn (Lait) devra quitter les 450 mètres carrés qu'il occupe au sein des Moulins albigeois. Le Département du Tarn, propriétaire des bâtiments, souhaite s'en séparer pour pouvoir réaliser des investissements, a plaidé Thierry Carcenac, président du conseil départemental du Tarn (PS). Cet ancien moulin à farine datant du XII° siècle et surplombant la rive droite du Tarn avait été transformé en usine de fabrication de pâtes alimentaires en 1850 puis réaffecté dans la deuxième moitié du XX“ siècle pour accueillir, dans sa partie publique, Le Lait et le Comité départemental de tourisme (CDT). Si le personnel du CDT est relogé au sein de l'hôtel Reynès, récemment acquis par le Département, le doute plane encore sur l'avenir du centre d'art. En 2009, Le Lait avait déjà été amputé de son antenne située à Castres. N. E. La maison Prouvé quittera Royan ROYAN I La maison préfabriquée construite par Jean Prouvé à Royan (Charente-Maritime) en 1950-1951 sera démontée en février, mars ou avril 2017, a confié le galeriste parisien Patrick Seguin. En 2015 (lire le JdA n° 450, 5 février 2016), ce dernier s'est porté acquéreur de cette habitation appartenant au maire de Royan afin de la démonter, restaurer puis remonter pour pouvoir l'exposer et la revendre. Le permis de (dé)construire avait été attaqué par l'association Artichem, qui a retiré son recours en septembre 2016 après avoir obtenu l'assurance qu'une étude documentaire complète de la maison dans son cadre d'origine serait réalisée, et qu'une signalétique patrimoniale serait apposée in situ, afin de préserver la mémoire de cette architecture à Royan. M. B. L'État au secours du Musée Girodet MONTARGIS (LOIREÏ) I Par le biais de la signature d'un acc0rd—cadre, Audrey Azoulay a entériné le 21 septembre le versement de 800 000 euros du ministère de la Culture pour participer au financement de la restauration des 2 600 œuvres du Musée Girodet endommagées par la crue du mois de juin. Une enveloppe de 400 000 euros sera débloquée fin 2016 et le reste en 2017-2018. Le coût total des restaurations est estimé à 2,4 millions d'euros. M. B. Venise : << Viva Arte Viva >> VENISE I Le thème de la 57° édition de la Biennale de Venise, qui se déroulera du 13 mai au 26 novembre 2017, est << Viva Arte Viva », soit l'« expression de la passion pour l'art », « [le lieu] par excellence de la réflexion, de l'expression individuelle et de la liberté », a annoncé le 22 septembre Christine Macel, commissaire de cette prochaine édition et conservatrice au Musée national d'art moderne-Centre Pompidou. N. E. -9 Retrouvez toutes ces informations développées sur: www.Le.|ournaldesArts.fr Faux Cranach et Hals dans le même bain La maison de ventes S0theby's et le Musée du Louvre sont éclaboussés par l'affaire des peintures à l'origine douteuse À gauche, attribuée à Lucas Cranach, Vénus, datée << 1531 », huile sur panneau, 38,7 x 24,5 cm, collection princière du Liechtenstein, Vaduzlvienne. ©Liechtenstein.The Princely Collections, Voduz-Vienna. À droite, attribué à Frans Hals, Portrait d'un inconnu, huile sur panneau, 32,4 x 26,8 cm. Ce tableau a été considéré comme « trésor national >> en 2008. PARIS I Les tableaux échangés pour des millions d’euros et provenant de Giuliano Ruffini, dont le domaine près de Parme a été perquisitionné à la fin mai 2016, se retrouvent en mauvaise posture. L’une après l’autre, les expertises renforcent les doutes sur les peintures retrouvées au fil des mois par l’0ffice central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC). Les nuages s’amoncellent en particulier au-dessus de la Vénus au voile attribuée à Cranach l’Ancien (1472-1553) et issue de la collection du prince de Liechtenstein, dont la saisie le 1"’ mars à Aix-en-Provence, a rendu le scandale public. Deux spécialistes, ayant pris connaissance des examens qui avaient déjà porté la suspicion sur cette oeuvre en 2012, s’accordent aujourd’hui pour la qualifier de « faux moderne ». Autorité incontestée sur le peintre, le restaurateur et historien de l’art allemand Gunnar Heydenreich est venu en septembre à Paris voir le panneau et a apporté un témoignage en ce sens à YOCBC qui l’avait convoqué. Tandis que Dieter Koepplin, l’un des historiens qui avait en 2013 cru reconnaître la main de Cranach, atteste désormais : «Il est absolumentclair pour moi qu’il s’agit d une contrefaçon. » Ces témoignages ont été corroborés par Fexpertise judiciaire qui a été rendue en juillet à la juge Aude Buresi. Cette analyse fouillée, que le journal des Arts a pu consulter, assimile le tableau à une habile imitation, même si tous les éléments en sont anciens (lire ci—c0ntre). Sotheby's Pour ne rien arranger, après une étude scientifique privée, Sotheby’s a dû rembourser à l’un de ses plus importants clients américains un l portrait provenant lui aussi de Giuliano Ruffini qu’elle lui avait vendu comme un inédit de Frans Hals (1580-1666). Les chiffres donnent un aperçu des sommes en jeu. Le prince du Liechtenstein a acheté la I/énus à la galerie Colnaghi (Londres) pour 7 millions d’euros. Associé à parts égales pour cette opération avec le marchand londonien Mark Weiss, Sotheby’s a fait payer dix millions de dollars le Portrait d’un inconnu par Hals à un collectionneur de Seattle, Richard Hedreen. Aucune des parties n’a souhaité apporté de commentaire. Mais, selon nos informations, Mark Weiss a refusé de rembourser sa part à Sotheby’s, en arguant qu’il n’avait pas eu les moyens de s’assurer du sérieux de Fétude. La maison de ventes n’a pas voulu communiquer le résultat de l’étude en question, ni indiquer si elle envisageait une procédure contre Mark Weiss. ]usqu’ici, le rôle de la société américaine a été passé sous silence. Mais son nom apparaît dans plusieurs ventes, dont celle d’un Saintjérôme, référencé comme issu du «cercle de Parmigianino », adjugé pour 800 000 dollars (545 000 euros) à New York en 2008. Sotheby’s s’est défendue en affirmant que ce tableau avait fait l’objet d’une « recherche exhaustive », tout en promettant que la avait été prêté par son acquéreur. Sotheby’s a aussi reconnu que, « à ce stade», elle n’avait pas pris contact avec la justice qui enquête pourtant sur ces faits depuis plus d’un an et demi. Le Louvre Ce rebondissement accroît d’autre part fembarras des musées français, déjà empêtrés dans les affaires de faux meubles. Car ce portrait avait été authentifié comme un «véritable chef-d’œuvre » de la période tardive de Hals par un conser. vateur du Louvre, Blaise Ducos, qui ‘ avait convaincu son musée d’essayer de lacheter. Aujourd’hui, lui aussi garde le silence. Quant à Giuliano Ruffini, il ne s’estime pas en difficulté pour autant puisqu’il « n’a jamais prétendu que ces œuvres étaient de grands maîtres». Il précise : « Ce sont les experts du Louvre qui ont authentÿié le Hals et le ministère de la Culture qui l’a classé “trésor national”. On dit que la Vénus serait une copie du X VIII” ? je n’en sais rien, je n’ai pas accès à ces expertises; quoi qu’il en soit, je n’ai jamais aflirmé moi qu ’il shgissait d ’un Cranach : ce sont les intermédiaires, les spécialistes et un marchand renommé qui ont avancé cette attribution. » Évoquant le flot de «rumeurs», son avocat, Me Philippe Scarzella, «regrette que le secret de l enquête ne soit pas resLe portrait avait été authentifié comme étant de Hals par un conservateur du Louvre maison « contacterait ses clients, si elle avait de sérieuses inquiétudes à propos des œuvres dont elle a eu la responsabilité». En attendant, le tableau a été décroché des cimaises du Metropolitan Museum of Art de New York, auquel il pecté et que le discrédit soit jeté sur des œuvres au seul prétexte quelles soient passées entre les mains de son client, créant une regrettable psychose sur le marché». Vincent Noce Rapport Pigments, craquelures. .. Uexpertise judiciaire portant sur la I/énus au voile se trouve désormais au cœur de Yaffaire. Hauteur du rapport, qui a fait appel à un panel de spécialistes, décortique ce tableau signé Cranach et daté « 1531 » en 76 pages d’examens et 137 pages d’annexes. Le Laboratoire de recherche des musées de France a rendu une étude d’une grande prudence, en relevant que les pigments «sont compatibles avec Fépoque présumée de Pieuvre», tout en pointant certaines anomalies dans leur forme et composition, sans se risquer à formuler une conclusion. Le plus intrigant concerne les craquelures, au « caractère aléataire», dont le «réseau ne suit pas les déformations du bois » et qui sont attribuées dans l’expertise à « un vieillissement artificiel». La comparaison avec deux Cranach appartenant au Louvre ne joue pas non plus en faveur de la composition, comme en attestent les photographies de détail. Le rendu «empaillé» des cheveux est juge’ particulièrement malhabile. «Lbbservation générale n’est donc pas cohérente avec les œuvres du corpus. » Le monogramme « ne tient pas la comparaison » avec la signature du peintre. Le tableau est dénué d’historique. Ce faisceau de discordances conduit à retenir comme « hypothèse la plus probable » que l’œuvre a été réalisée « avec le soin dimiter un travail de Cranach, en se référant à dzfiférentes sources». Le coup de grâce est venu de l’examen du panneau par une chercheuse du CNRS, au Laboratoire d’archéologie moléculaire et structurale. Elle s’est étonnée de sa courbure accusée, « inhabituelle », ainsi que des « dépôts noirâtres » pouvant indiquer qu’il avait été chauffé. Après confrontation avec les bases de données européennes, elle a déduit que le chêne avait été abattu en France vers la fin du XVIII“ siècle. Néanmoins, sur un prélèvement examiné il y a deux ans à Hambourg à la demande du prince de Liechtenstein, le professeur Peter Klein avait, lui, estimé que le bois provenait d’une forêt allemande au début du XVIÉ Les deux spécialistes doivent se rencontrer en novembre pour essayer de comprendre comment ils ont pu aboutir à un écart temporel aussi important. Mais cette difficulté ne manquera pas d’être relevée par les avocats, d’autant que cette datation est notée dans le rapport judiciaire comme étant la preuve irrécusable de la fausseté de l’œuvre. V. N. LE JOURNAL DES ARTS N9464 / Du 30 septembre ou 13 octobre 2016 Potrimoine 9 Syrie Course contre la montre pour documenter le patrimoine Avant que des pans entiers de l'Histoire ne disparaissent à jamais, à la suite des destructions et pillages, un inventaire documenté des sites menacés, permis par la technologie 3D, se met en place dans le pays SYRIE I Des fragments d’objets brisés, des tunnels de 20 mètres forés au bulldozer, de gros trous au sol témoignant des pillages... Le site assyrien de Tell Ajaja, en Syrie, occupé par le groupe État islamique entre 2014 et 2016, offre aujourd’hui un spectacle de désolation. Certes, les principaux objets exhumés lors des fouilles du site aux XIX“ et XX“ siècles, conservés dans les musées syriens, ont été mis à l’abri dès le début du conflit syrien. Il n’empêche. Des statues millénaires et des bas-reliefs ont été détruits ou volés et des couches archéologiques entières, qui n’avaient pas encore été étudiées, ont été pulvérisées. « À coups de bulldozers, ces barbares ont brûlé des pages de l’histoire de la Mésopotamie. En quelques mois, ils ont détruit ce qui aurait nécessité près de cinquante ans de fouilles l», s’est insurgé Maamoun Abdulkarim, à la tête de la Direction générale des antiquités et des musées de Syrie (DGAM), à Damas. Pourtant, contrairement aux destructions de Palmyre, le saccage de Tell Ajaja a été peu médiatisé. Or, du point de vue des connaissances, si la destruction du temple de Bêl à Palmyre constitue une perte considérable, le site avait pour le moins été étudié. Tel n’est pas le cas de Fensemble du site assyrien de Tell Ajaja, considéré comme l’un des plus riches de Syrie, et dont le saccage laissera des béances dans l’Histoire elle-même. « On ne retrouvera jamais les archives uniques de son histoire, détruites avant d’avoir été exhumées », déplore Parchéologue et conservatrice du patrimoine au Musée du Louvre Sophie Cluzan, spécialiste du patrimoine syrien et irakien. Car les destructions des sites de Palmyre, Ninive, Nimroud, savamment mises en scène et exploitées médiatiquement par le groupe État islamique, ne constituent qu’un des aspects de la saignée du patrimoine du Moyen-Orient. En effet, si les sites archéologiques du Moyen-Orient étaient déjà victimes des fouilles illégales avant la déstabilisation et Yembrasement de la région en 2011, les conflits qui ont éclaté à la suite des révolutions arabes ont provoqué Facceflération et Pexplosion du phénomène, en constante augmentation depuis une trentaine d’années — les biens culturels constituant aujourd’hui le troisième plus important trafic au monde, derrière la drogue et les armes. Mais ce trafic n’est-il pas un moindre mal face à la destruction pure et simple des pièces, si celles—ci ont une chance d’être un jour saisies sur le marché ? Absolument pas. Car chaque objet exhumé n’a un intérêt archéologique que s’il peut être interprété scientifiquement. « Un site est constitué d’une succession de couches qui racontent une histoire. Chaque couche en est une période ; et à lintérieur de chacune, les objets, dans les relations qu’ils entretiennent les uns avec les autres, racontent eux-mêmes une histoire. Chaque fois que I’on perd I’un d’eux, on efface une pièce de puzzle, de fizçon irrémédiable », explique Sophie Cluzan. Ainsi, si Yon peut se réjouir de retrouver un objet intrinsèquement beau, ce demier n’en restera pas moins muet pour les historiens. Une surveillance suspendue Les acteurs de cet effacement du grand puzzle de l’histoire des civilisations ? Non seulement Daech, qui délivre des permis de fouilles illégaux sur les territoires qu’il contrôle, mais aussi tous les acteurs qui participent au conflit... et ce généralement avec la complicité des populations locales. «Avant Z011, les sites, fouillés par des archéologues étrangers, pouvaient être préservés: non seulement ils étaient gardiennés, mais aussi les villageois avaient intérêt à ce que les sites soient protégés et que les fouilles se poursuivent. La présence des équipes étrangères, qui revenaient chaque année, procurait du travail à des familles, et participaient en outre à l’économie locale par leurs besoins en hébergement, nourriture, services... », rappelle Samir Abdulac, président du groupe de travail pour la sauvegarde du patrimoine culturel en Syrie et en lrak, au sein de l’ONG Icomos, qui travaille en lien avec la DGAM. Or, avec la guerre, la surveillance des sites est devenue impossible, et les archéologues ont dû suspendre leurs missions : les moyens de subsistance qu’en tiraient les populations ont disparu. Certaines se sont alors toumées vers la fouille sauvage des sites archéologiques à proximité desquelles elles vivaient et qu’eHes connaissaient bien. «Par exemple, le site d’/lpamée a été fiouillé de fizçon quasi industrielle: on observe un trou par mètre carré», décrit Samir Abdulac. De fait, la déstabilisation du pouvoir central, et a fortiori la guerre, font exploser des pratiques illégales endiguées par le régime en place — même si, souligne l’archéologue Sophie Cluzan, « l’arme’e syrienne s’installait sur des sites archéoloTell Ajaja est l'un des sites assyriens les plus riches de Syrie. Encore peu fouillé, il a subi les déprédations de l'organisation État islamique, pillant statues et bas-reliefs non encore découverts par les archéologues. © Photo :Ayhom aI-Mohummad. giques avant même 2011, en occasionnant des dégâts considérables dont on ne parlait pas ». Car aux destructions causées par les combats, s’ajoutent celles rendues possibles par Faffaiblissement de Yautorité, comme par la situation humanitaire. Ainsi, au début du conflit syrien, des constructions sauvages ont commencé à pulluler sur des sites protégés. De même, le patrimoine vernaculaire — des maisons anciennes habitées — a souffert de réparations urgentes au béton, ou se sont vues affublées de nouveaux étages en dehors de toute réglementation. Enfin, des familles déplacées se seraient installées dans les villes mortes du nord-ouest de la Syrie, villages de l’Antiquité tardive et de Fépoque hellénistique très bien conservés, inscrits au Patrimoine mondial par l’Unesco. « Anqa », un projet phœnix Afin de limiter l’impact sur les connaissances historiques des destructions (bombardements, destructions volontaires, dégradations volontaires ou encore fouilles illégales), Flcomos a mis en place, en collaboration avec la société américaine CyArk, spécialisée dans les technologies 3D appliquées au patrimoine culturel, un programme de formation pour les acteurs du patrimoine syrien. Le nom du projet global, qui vise à documenter les sites avant qu’ils ne soient détruits ou modifiés : « Anqa >>, mot arabe signifiant le « phœnix », oiseau qui renaît de ses cendres. La start-up Iconem se mobilise également pour établir des relevés 3D du patrimoine syrien menacé ou endommagé, en lien avec les équipes locales de la Direction générale des antiquités. « En rendant possibles des inventaires très précis et rapides, ces technologies permettent de lutter dans l’urgence contre une perte sèche de connaissances », explique son fondateur, Yves Ubelrnann — qui vient d’être décoré d’un «bouclier» de la DGAM pour son soutien scientifique et technique. Un projet ne’ avant même le début de la guerre, au cours de missions archéologiques menées au Moyen-Orient, en particulier en Afghanistan. «j avais constaté que des pans entiers de Fhistoire disparaissent à cause de l’urgence des constructions de villes ou dinfiastructures, faute de temps pour tout inventorier, et parfois d’archéologues spécialistes de la période sur place. je me suis aussi aperçu que des périodes suscitant moins d’in térêt actuellement voyaient leurs sites moins protégés... Enfin, il are rive que des archéologues n’aient pas le temps de publier le résultat de leurs recherches : à leur mort, les connaissances qu’ils avaient acquises disparaissent avec eux », observe Yves Ubelmann. Celui-ci s’est donné pour mission aujourd’hui de constituer une plate-forme en ligne des sites archéologiques menacés, accessible à toute la communauté scientifique. Un barrage contre le néant et l’oubli. Marie Zawisza Exposition Centre culturel canadien Paris AICA CRITIQUE D'ART ANNE TRONCHE: MARIECECILE MARC LENOT: MATHILDE ROMAN: KLAUS SPEIDEL: ].EM|L SENNEWALD: URNICHON: La rétrospective des prix 2013-2016 l
> progresse simultanément, portée par des personnalités du monde médical et de la société civile que fédère le professeur René Mornex, ancien vice-président des Hospices. Adressée à Gérard Collomb, une pétition ayant recueilli des milliers de signatures plaide pour ce projet qui consiste à enrichir les collections du musée en place par d’autres collections lyonnaises : musées d’histoire de la médecine, d’anatomie et d’art dentaire, tous trois hébergés par l’Université, ainsi que le fonds radiologique Renaud. L’ambiti0n est de créer le pôle national de référence s’agissant de Fhistoire de la médecine, dont les 15 500 numéros au catalogue du Musée des hospices montreraient le versant local, par des instruments chirurgicaux et certains ustensiles uniques comme la seringue de Pravaz, des objets témoignant de la vie dans les hôpitaux (mobilier, tapisseries, céramiques...), mais aussi des liens entretenus par les établissements de soin avec la ville. «Après cinq ans de lutte, confie aujourd’hui le professeur Momex, je dois rendre les armes. Le refirs du maire de mettre le moindre euro, pour ne pas grever lesfinances publiques, a dissuade d éventuels mécènes. » C’est qu’entre-temps, aussi, l’État a accepté la candidature de Lyon à intégrer le réseau des Cités intemationales de la gastronomie — dont les autres villes membres sont Tours, Dijon et Paris-Rungis. Pareil établissement au sein de l’Hôtel-Dieu serait évidemment plus alléchant pour le grand public qu’une institution muséale montrant les souffrances du corps... Des points mémoriels dans la Cité gastronomique ? Les quatre Cités de la gastronomie devant chacune développer une thématique propre, Lyon a choisi celle des relations entre nourriture et santé. Reviennent tout de suite à l’esprit Rabelais médecin diététicien avant la lettre, et les pièces du musée des Hospices ayant trait à l’alimentation : impensable de ne point les intégrer au parcours de la Cité de la gastronomie. René Mornex, frustré de son grand musée, n’essaie-t-il pas de faire adopter l’idée de «points mémoriels » qui montreraient au fil des bâtiments de l’Hôtel-Dieu Fimportance des avancées scientifiques y ayant vu le jour ? Il a d’ailleurs monté l’exposition << Les “trente glorieuses” de la médecine lyonnaise », au tournant des XIX“ et XXE siècles, programmée en octobre au fort de Vaise (Lyon-9‘). Sur ces points mémoriels, Georges Képénékian, premier adjoint au maire ~ et urologue réputé — reste réservé : «Il faudra voir, dans les expositions temporaires de la Cite’, ou parmi les bâtiments de I’HôteI—Dieu, s’iI est possible de pratiquer des rappels homéopathiques de cette histoire lyonnaise. » Pareille hypothèse n’a pour l’heure été creusée ni par AIA et Didier Repellin, côté maîtrise d’œuvre, ni par les Hospices, restant propriétaires des lieux et des collections du musée, ni par Eiffage, qui a engagé le chantier de la reconversion en avril 2015. Les travaux ont entraîné le stockage des collections du musée, mises à l’abri aux archives municipales et à la bibliothèque municipale. Les seuls éléments restés en place sont les superbes boiseries des XVII‘ et XVIIF siècles qui ornaient apothicairerie et salle des archives de Fhôpital de la Charité, récupérées à la destruction de celui-ci. Inamovibles, elles resteront aux Quatre-Rangs, où s’installera la Cité de la gastronomie. Nul ne sait comment ce décor sera intégré à la Cité, dont les scénographes doivent être choisis en 2017. Pour l’heure, Sergueï Piotrovitch d’0rlik, conservateur du musée expulsé, met le projecteur sur quelques-uns de ses trésors au moyen d’expositions visibles sur le Net Mais, ô surprise, la commune de Rillieux-la-Pape en périphérie lyonnaise vient de prêter une partie d’une caserne désaffectée pour une tout autre initiative : un << Musée des sciences médicales et de la santé », porté par un collectif de médecins, universitaires et historiens en la matière, que représente ]ean—Christophe Neidhardt. Sont déjà arrivées les collections du musée d’anatomie, bientôt certaines du musée d’art dentaire. Deux composantes, on s’en souvient, du projet de « grand musée » à l’Hôtel-Dieu... Gabriel Ehret (1) www.chu-lyon.fr/ web / 4696 En haut, projet d'aménagement de l'hôtel Intercontinental. ©AgenceJean-Phi|ippe NueI.Ci—dessus, la salle des archives de la Charité, avec ses boiseries xvne-xvme siècle. © Ph. : Sergue'I'Piotrovitch d’Orlik. LE JOURNAL DES ARTS N9464/ Du 30 septembre ou 13 octobre 2016 Aflusées Art brut Un musée pr 1vé à Montpellier il La maison-atelier de Fernand Michel a été transformée par deux fils de l'artiste MONTPELLIER I Casquette sudiste vissée sur la tête et cigare au bec, Fernand Michel (1913-1999) accueillait le visiteur dans le lumineux hall d’entrée de l’Atelier-musée, à Montpellier. Relieur d’art en joumée, il donnait libre cours à sa créativité et à son imaginaire débordant, à partir de 17 heures, une fois les portes de son atelier fermé. Au début des années 1960, il se fait une spécialité de Fassemblage de plaques de zinc oxydées qui se métamorphosent en œuvres d’art à connotation érotique, souvent pleines d’humour. Ce créateur hors les normes a côtoyé de grandes figures de l’art brut comme Slavko Kopac, le conservateur de la Collection de la Compagnie de l’art brut, le galeriste Alphonse Chave, et Alain Bourbonnais, le fondateur de la Fabuloserie. Après sa disparition, ses deux fils décident de rénover la maison familiale pour la transformer en un musée en hommage à leur père et aux créateurs autodidactes, singuliers et visionnaires. Ils créent une association et, pendant huit ans, Patrick Michel sillonne l’Europe afin de réunir des centaines d’œuvres d’art brut et singulier. Aux nombreux dons faits par les familles ou légataires des artistes, les artistes eux-mêmes ou les institutions qui les hébergent, viennent s’ajouter quelques acquisitions effectuées le plus souvent en ventes publiques. Situé dans le quartier des BeauxArts à deux pas du Corum (Palais des Congrès-Opéra Berlioz), le musée est abrité dans un bâtiment moderne de trois étages, la maison-musée se trouvant en lot arrière. Dans le hall d’entrée, un escalier grimpe au premier étage où sont réunies plusieurs centaines d’œuvres puisées dans le fonds qui en comporte près de 2 300. À droite, une grande pièce est dévolue à l’art brut. «]’ai voulu montrer la diversité de ces créateurs », explique Patrick Michel qui s’est efforcé, quand cela lui l‘ Vue de salles de l'Atelier-musée, nouveau musée d'art brut à Montpellier. Photo on e en musée privé d'art brut et singulier était possible, de présenter deux ou trois pièces de chaque artiste. À l’entrée de la salle, une vitrine abrite des œuvres d’Alfred Corinne Marié alias «ACM » : deux de ses architectures débridées bricolées à l’aide de pièces empruntées à d’anciennes machines à écrire et autres composants électroniques volés à des réveils et transistors. Suivent de petites gouaches d’Eu— gène Gabritschevsky, non loin d’un bel ensemble de poupées faites de cordes, de haillons et de plumes dues à Michel Nedjar. Plus loin : des œuvres symétriques et colorées du peintre médium Fleury Joseph Crépin. «]’aifait plusieurs centaines de kilomètres accompagné d’un collectionneur suisse pour aller rencontrer Helmut [Nimczewski] à Hambourg », s’amuse Patrick Michel en guidant le visiteur. Poursuivant : «L’une de ces œuvres de Paul Duhem nous a été ojferte par Bruno Gérard, le directeur du département d’Art brut du Centre La Pommeraie (en Belgique) ». Un parcours peu ordonné Les œuvres sont alignées les unes à côté des autres sans que l’on perçoive clairement les lignes directrices du parcours. Quelques artistes singuliers tels Gaston Chaissac ou Simone Le CarréGalimard apparaissent un peu perdus au milieu de cet ensemble consacré à l’art brut. De belles pièces comme ces étranges silhouettes perforées de trous signées Carlo Zinelli ou ce Roi enrhumé de Friedrich Schrôder-Sonnenstern côtoient des œuvres plus modestes et de petit format de maîtres de l’art brut comme Walla ou Aloïse. «Il nous manque notamment un [Martin] Ramirez et un [Henry] Darger. Mais, compte tenu de leur cote, et faute de subventions, nous n’avons pas les moyens d’en acquérir », déplore le directeur de l’Atelier-musée. À l’étage, une passerelle dessert un second espace voué aux artistes singuliers. Là aussi, les œuvres sont souvent fortes et de qualité comme cette poignante pièce de Jephan de Villiers intitulée Le Peuple sous l’écorce. Dans une petite salle sont réunies quelques figures du Folk art américain parmi lesquelles Mose Tolliver, Dwight Mackintosh, Purvis Young et Mary T. Smith. Suite de la visite au rez-de-chaussée de l’immeuble. Après avoir traversé un joli petit jardin orné de sculptures, le visiteur arrive dans l’ancienne maison où a vécu et travaillé Fernand Michel. Dans une première salle sont exposées quelques-unes de ses œuvres en zinc, à côté de son atelier de reliure conservé ‘en l’état. À Fétage, place aux œuvres d’artistes qui étaient ses amis, Gérard Eppelé, Jean-Joseph Sanfourche ou encore François Rouan, apparemment très séduit par ses « byzantines, baroques et maniérées Nanas ». Éric Tariant ' L'ATELIER-MUSÉE, ARTS BRUT, SIHGULIER & AUTRES, 1, rue Beau-Séjour, 34000 l’ Montpellier. tél. ou 67 79 62 22, www.ateIier-musee.com, du mercredi au dimanche 1oh13h, 1uh—18h, entrée 8 e. L'ATELIER-MUSÉE -) Nombre d'artistes: 250 -) Nombre d'œuvres : 750 8 OCT > 6 NOV 201 6 MONT DE MAR SCULPTURE un EDITION MUSÉE DANS LA nue S S CHAHBUNNEL 0 CLAUDEL 0 CORDA DELlSLE I DESFIAU 0 DIOP 0 FABHE LEROY 0 MlTÜRAJ 0 HEYNÈS HÜDIN 0 VIHEPINTE Strasbour ‘eu euromëtropole L’Œil du collectionner Neuf collections particulières p strasbourgeoises pass i o n§ p artagees dis collections MUSÉE D'ART MODERNE ET CONTEMPORAIN 1 PLACE HANS-JEAN-ARP WWW.MUSEES.STRASBOURG.EU g DE LA VILLE DE TRASBOURG in ce o Focus 1 17.09.2016 - 20.11.2016 Focusä 10.12.2016-26.03.2017 mont de ‘ '90” marsan OIHRSHII |'|‘|l|||I|||l'|'| n M‘ fi F’ E G I 0 N )6. *°2:;%::.N Wmw e i. ‘~.>/ DOITOU-CHARENTES if montdemarsanjr f Mom (le Marsan ma ville #MDMS LE JOURNAL DES ARTS N9464 / Du 30 septembre uu 13 octobre 2016 l2 PARIS I Le pari n’était pas gagné d’avance. Outre la difficulté de trouver des prêts, le Musée jacquemart-André a voulu resserrer Fexposition << Rembrandt intime » autour des portraits de la Princesse Amélie de Solms (1632) et du Docteur Arnold Tholinx (1656) ainsi que du Repas des pèlerins d’Emmaüs (1629) acquis au XIX“ siècle par son fondateur, Édouard André. Évitant pour partie le découpage chronologique, peu adéquat à la compréhension de I’ceuvre du peintre (1606-1669), il offre une large place à Festampe, dans laquelle il fait merveille, et au dessin. On peut néanmoins regretter que toutes les feuilles ne soient pas incontestablement de sa main. Il suffit de regarder les hachures parallèles du dit «autoportrait» issu du Cabinet des estampes et dessins des Musées de Berlin, qui ne lui apportent rien, et de les comparer aux tourbillons d’un acteur ou à la flamme d’un ange, pour avoir un doute. Le musée a obtenu des prêts exceptionnels de tableaux, dont la restauration a fait ressortir les modelés et couleurs, venus du monde entier. Les Français peuvent se montrer moins prêExpositions Xvllesiècle Rembrandt, à la lueur des perles Le Musée Jacquemart-André rend un bel hommage à l'artiste, un peu gâché par la répétition de clichés qui faussent la vision de l'œuvre À gauche, Rembrandt, Le Repas des pèlerins d'Emmaüs, vers 1629, huile sur papier marouflé sur bois, 37,4 x 42,3 cm, Musée Jacquemart-André, Paris. ©Musée Jacquemart-André-lnstitut de France/ Studio Sébert Photographes. À droite, Rembrandt, Autoportrait à la chaîne d'or, 1633, huile sur bois, 6o x a7 cm, Musée du Louvre, Paris. © Photo : RMN (Musée du Louvre)/Hervé Lewandowski. (n; BNP PARIBAS i: FORTIS teurs, puisque manque l’impressionnante Crucifixion de Féglise du Mas-d’Agenais, fruit de Fémulation provoquée par son compagnon jan Lievens comme par Rubens — ce qui ne fait guère honneur aux services du ministère de la Culture et à la commune du Lot-et-Garonne. L’Emmaüs est une scène saisissante de jeunesse, traitant le Christ en ombre découpée, sur le point de disparaître en faisant fuser un jet de lumière. La Révélation, et son corollaire la stupéfaction, forment un thème plusieurs fois abordé par Rembrandt. Dans Veau-forte de La Résurrection de Lazare, les personnages sont rendus à des silhouettes traversées par la lumière. L’artiste cherche à appréhender l’instant, auquel il entend donner toute son intensité dramatique, dans une veine qui n’est pas étrangère au caravagisme. REMBRANDT INTIME, jusqu'au 23 janvier 2017, Musée Jacquemart-André, 158, bd Haussmann, 75008 Paris, www.musee—jacque mart-andre.com, tlj 1oh—18h, lundi jusqu'à 20h30, entrée 13 ê. Catalogue, 32 €. REMBRANDT -D Commissariat : Emmanuel Starcky, directeur des Domaines et Musées nationaux de Compiègne et de Blérancourt; Peter Schatborn, conservateur en chef émérite du Cabinet national des estampes au Rijksmuseum d'Amsterdam ; Pierre Curie, conservateur du Musée Jacquemart-André -> Scénographie : Hubert le Gall -9 Nombre d'œuvres : 53 tableaux et dessins Cette inclination se retrouve dans Balaam et Fânesse (1626), en bonne place pour servir d’introduction. Ce tableau rapporte la mésaventure du mage prophète parti persécuter le peuple d’lsraël. Un ange invisible s’étant interposé pour arrêter sa monture, le mage frappe violemment l’animal à coups de bâton. L’élève entre cette fois en concurrence avec son professeur, Pieter Lastman, qui a traité le même sujet quelques années plus tôt ; Rembrandt concentre des personnages saisis de biais et choisit le moment où l’âne profère ses reproches à son maître. Ernst van de Wetering, qui a entièrement révisé l’œuvre du peintre, explique combien l’étude de cette composition en a renouvelé la vision, Autour de la tête de l’ani— mal, on peut observer que le ciel et l’ange ont été peints en premier, en laissant en réserve la silhouette des figures. Ce n’est que dans un deuxième temps que celles-ci ont été placées, renforçant l’impression de profondeur. Progressivement, le spécialiste s’est « rendu compte que fauteur avait systématiquement usé de cette construction d’arrière en avant», en tout cas jusqu’à la dite Ronde de nuit (1642), influençant profondément la méthodologie du groupe << Projet de recherche sur Rembrandt » qu’il dirigeait. Plis et pores de la peau S’il est une leçon à mettre à profit, ce serait de chercher à comprendre le détail, la dispersion de la lumière (son obsession), les nuances bleu-vert d’une montagne, le brillant des perles, le pli du menton chez les dames ou même les pores du Vieil homme en costume oriental venu du Metropolitan museum of Art de New York. Uartiste peut s’attarder longuement sur des brocarts, en passant rapidement sur les mains, ou, à l’inverse, tracer délicatement les veines. Au même moment, il peut peindre le portrait lisse et un peu ennuyeux d’une princesse et une tête de soldat éclatant de rire à coups vigoureux d’empâtements. Les autoportraits, en réalité des “portraits de lui-même”, plus justement appelés, étaient dictés par la demande du marché Aussi l’œuvre de Rembrandt ne peut-elle être enfermée dans une succession de << styles » accolés à des périodes, comme le suggèrent malheureusement les panneaux et le catalogue. La répétition de tels poncifs hérités de l’histoire de l’art du XIX“ siècle est d’autant plus irritante qu’elle se trouve émaillée de projections symbolistes, faisant de Rembrandt « un génie » dont les « autoportraits » seraient l’expression d’une quête irrépressible de « l’âme» et de la «fragilité humaine ». Peignant son fils en train de lire, il se livrerait à une émouvante démonstration d’« amour paternel ». En réalité, ces «portraits de lui-même», comme ils étaient plus justement appelés, étaient dictés par la demande du marché — et quand celle-ci venait à manquer, il n’en peignait pas. Et il était courant d’user de ses proches comme de modèles. Il est dommage que le musée ait cédé à cette enfilade de perles, d’autant plus devant une telle collecte d’œuvres. Vincent Noce lE JOURNAL DES ARTS N‘-'464 / Du 30 Septembre au ‘l3 octobre 2016
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